Clément a une riche expérience de designer industriel/produit élargi à d'autres responsabilités (chef de projet, manager) qui lui donne aujourd'hui un regard à 360° sur sa discipline et une pertinence. Il a pu intervenir aussi bien sur des produits innovants et en lancement pour des start-ups, avec succès, ou a constaté de lui-même les limites d'une mauvaise utilisation de la puissance du design, comme pour des marques bien établies ou des univers comme l'automobile dans des concept-cars ultra exigeants en termes de design que de contraintes environnementales. Il revient sur son parcours et sur quelques-uns de ses projets.
Bonjour Clément, quelques-mots sur ton parcours de designer ?
Je suis diplômé de Créapôle en Design Industriel depuis 2012. Pendant mes 5 ans de cursus, j’ai eu l'occasion de faire 3 stages, le premier dans une entreprise spécialisée dans les jouets qui travaillaient notamment avec Hachette Collection, le second dans le milieu de l’audio chez Inovadis (aujourd'hui AV - Industry), dont Elipson est la marque phare et le dernier chez Technicolor Thomson en intervenant sur des produits télécoms.
Par la suite, j’ai eu comme opportunité de premier emploi un poste de designer intérieur automobile dans le studio Toyota-Boshoku Milan Design, spécialisé dans le design d’intérieur automobile (sièges, tableaux de bords, intérieurs de porte, tissus, etc.). L’équipe était multiculturelle avec beaucoup de japonais. Nous travaillions sur beaucoup de projets prospectifs et de concept-cars.
Avec l’émergence de la French Tech (dont 19 Hz fait partie), j’ai ensuite eu envie de rentrer en France et de travailler avec des start-ups pour m’immerger dans les lancements d’une entreprise, côtoyer d’autres métiers que celui du design, et pouvoir les accompagner depuis leurs débuts.
J’ai d’abord été freelance pendant 9 mois et ai eu l’occasion de collaborer avec Bbnove (produits de puériculture), Emiota (ceinture connectée) ou encore PKparis (objets connectés). J’ai finalement rejoint PKparis en tant que designer intégré pour les aider à créer de nouveaux produits connectés. J’ai notamment travaillé sur leur projet de montre à destination des diabétiques, ce qui m’a permis de découvrir le design UX/UI et de me frotter à la création d'applications web et mobiles.
Pour finir, en 2018, je suis retourné chez AV Industry en tant que Manager du Bureau d’étude et du Design. Ce fut un poste très intéressant où j’ai pu suivre de nombreux projets pour les 5 marques de l’entreprise, en intervenant sur toutes le phases de création et de développement (design des produits, des packagings, graphisme, communication, contrôle qualité, relations avec l’Asie, SAV), jusqu’à la mise sur le marché.
Comment te définirais-tu en tant que designer ? Quelles sont tes forces, tes singularités ?
Pour moi, le designer n’est pas un artiste et se doit avant tout de répondre à une problématique, un besoin, en améliorant le quotidien et l’usage d’un produit ou d’un service pour ses utilisateurs.
Même dans les produits qui paraissent les plus simples il y a de quoi réfléchir à l’usage. Par exemple, pour la marque Elipson j’ai dû réaliser plusieurs amplificateurs audio. Ce sont des produits très techniques, avec une taille et une forme bien définie, mais il y a quand même une réflexion d’usage à apporter. Sur ce type de produit, en tant que designer, je me projetais donc sur son utilisation et me posais des questions sur le positionnement des boutons, l’affordance des réglages et des menus, etc. même pour des interfaces très simples.
L’une de mes forces est donc cette empathie et cette capacité à me mettre facilement à la place des utilisateurs, penser à travers lui en me détachant de ce que je sais ou de ce que je crois savoir.
Mon expérience et les projets très variés que j’ai pu faire m’ont aussi permis d’être force de proposition tout en étant capable d’être réaliste et concret en sachant prendre en compte l’ensemble des contraintes associées à la création d’un produit. J’ai l’habitude de travailler avec des ingénieurs, des chefs d’entreprise, des responsables du marketing et me confronter aux enjeux industriels, business, budgétaires ou normatifs. Hors concept, le designer se doit de faire un produit de série, c’est d’ailleurs encore une de ses grandes différences avec l’artiste.
Sur quels enjeux futurs le design et les designers pourraient-ils apporter des réponses ?
Je pense vraiment que si les entreprises embauchaient des designers spécialisés dans l’éco-conception associée à la méthodologie design, il serait possible de révolutionner tous les usages des pays développés comme les nôtres, qui polluent énormément.
En pensant l’éco-conception au-delà de l’aspect purement marketing ou sous la contrainte politique, je pense qu’il y a de vrais défis à relever en prenant tous les éléments liés l’écosystème d’un produit et en réfléchissant à tout ce qui peut impacter son cycle de vie et comment ainsi l’améliorer.
Pour finir, sur quel projet rêverais-tu de travailler ?
Je rêverais de pouvoir apporter mon expérience pour de nouvelles marques de l’automobile, qui pensent les nouveaux usages et l’avenir de la mobilité.
Focus sur 3 projets de Clément :
1. Concept-car pour Lexus
Peux-tu nous parler de ce concept-car et des éléments sur lesquels tu as travaillé ?
J’ai eu la chance de travailler avec le studio Toyota Boshoku Europe, situé à Sophia Antipolis à côté de Nice, avec qui nous avons réalisé le concept car Lexus LF-SA, présenté au Salon de Genève 2015. J’étais, pour ma part, le designer principal des sièges avant et arrière du concept.
Ce concept-car se voulait être un petit cross-over compact pour définir les futures tendances et ainsi inspirer les prochaines séries de voitures Lexus.
L’idée était d’avoir une continuité entre les portes et les fauteuils, qu’une fois celles-ci fermées, le conducteur et ses passagers se sentent comme dans un cocon. La place du conducteur était d’ailleurs mise en avant dans ce concept, avec un siège exclusivement conçu pour lui, différent de ceux des passagers et inspiré des cockpits d’avion.
Une attention toute particulière avait été apportée aux matériaux, très qualitatifs, pour jouer sur les effets de matières et de textures et ainsi créer une expérience sensorielle unique.



2. "La Tartine", anneau de dentition pour Bbnove
Quel était le contexte de ce projet destiné aux bébés ?
J’ai été contacté par Bbnove, start-up spécialisée dans des produits de puéricultures simples et bien pensés, pour réaliser un anneau de dentition pour bébé, La Tartine.
Sur des briefs comme celui-ci, j’aime proposer 3 concepts différents : un premier concept qui répond quasi littéralement au brief, un second un peu plus éloigné mais qui peut être plus cohérent et un dernier plus décalé, qui est souvent l’idée la plus appréciée.
Le concept final provient souvent d’un mélange de ces 3 idées en le rendant plus réaliste et adapté aux contraintes du projet.

Quel est le concept final qui a été développé ?
Après avoir observé des bébés, notamment ma filleule qui avait 6 mois à l’époque, j’ai relevé qu’elle adorait se faire les dents des croûtes de pan que lui donnait son père. La croûte étant vraiment dure et avec différentes aspérités, c’était idéal !
Je suis donc parti de cette idée pour en faire un produit très simple mais avec différentes aspérités adaptées à l’âge du bébé qui pourra mâcher le côté qui lui plaît le plus en fonction de la croissance de ses dents.
Le produit est en silicone ce qui permet de pouvoir le faire chauffer ou de le mettre au congélateur, les différences de températures aidant à apaiser les douleurs lors de la pousse des dents.
C’est finalement un produit très simple, esthétique, à la forme rectangulaire et aux proportions idéales pour que l’enfant le prenne en main et l’utilise sans risque de s’étouffer. Il est également très facile à produire à un faible coût et peut s’empiler pour un conditionnement et un rangement optimal.
Bbnove a ainsi pu proposer un produit innovant et très différenciant des anneaux de dentition plus classiques.

3. Ampli et préampli pour Elipson
Comment s'est déroulée la création de ces produits hifi, à la fois techniques et haut de gamme ?
Sur ces deux produits techniques, amplificateur et pré-amplificateur, l’enjeu était d’avoir les codes de la marque Elipson et amener de la qualité perçue en accord avec l'image de la marque, qui a un positionnement plutôt premium avec une esthétique épurée.
Pour pouvoir y répondre, l’idée a été de travailler le graphisme pour créer une cohérence, une continuité entre les 2 produits au travers d’une rainure qui vient se prolonger et encercler les différents boutons.
Au niveau de l’ergonomie d’usage, même si elle est relativement simple, il y a quand même un écran, des boutons de contrôle, une télécommande. Il y a donc une réflexion à amener pour que l’utilisateur ne se perde pas et puisse très facilement utiliser son matériel hifi.
Sur un petit objet comme la télécommande par exemple, j’ai dû me questionner sur la taille des boutons, leurs positionnements (droitier/gaucher), sa cohérence avec l’ensemble, ce qui est rarement fait dans ce domaine.


Clément intervient en Design Studio avec un périmètre d'intervention large en design industriel, produit et managérial, fort de son expérience. Il est également designer mentor sur le parcours d'accompagnement d'entreprises sur leur projet d'innovation Design Project, Création et développement de produits innovants centrés utilisateur. N'hésitez pas à nous contacter si vous avez des enjeux d'innovation produit, que vous soyez une start-up en lancement une PME-ETI, Clément saura vous apporter son expertise et son savoir-faire pour vous trouver les bonnes solutions qui vous feront gagner en valeur.